KORTE Barbara, PALETSCHEK Sylvia, HOCHBRUCK Wolfgang (Hg.), Der Erste Weltkrieg in der populären Erinnerungskultur, Essen, Klartext, 2008, 222 p., ISBN 978-3-89861-727-7.
Cela fait maintenant une bonne dizaine d’années que la Première Guerre mondiale est fréquemment relue, en France, à l’aune des problématiques de l’histoire culturelle. La culture populaire n’y est pas négligée, mais elle n’a pas encore fait l’objet, dans ce contexte, d’une approche théorique spécifique. C’est justement une approche de ce type que se propose de mettre en œuvre le volume consacré à La Première Guerre mondiale dans la culture mémorielle populaire, dirigé par Barbara Korte, Sylvia Paletschek et Wolfgang Hochbruck.
L’ouvrage rassemble treize contributions organisées en trois parties. La première partie concerne le domaine du musée, de l’exposition et du monument. La deuxième porte sur la littérature et la bande dessinée. La troisième se consacre à l’ « histoire en mouvement », à travers le film, la télévision, le théâtre et le voyage.
Un tiers des contributions concerne les pays anglo-saxons : B. Korte souligne la place de la Grande Guerre dans les romans policiers anglais contemporains, Peter Londey et Nigel Steel évoquent le rôle de la bataille de Gallipoli dans la mémoire nationale australienne et Christina Spittel explique que la Première Guerre mondiale est encore très présente dans la littérature de jeunesse australienne. Quelques contributions abordent indirectement la France : Gerd Krumeich insiste sur le rôle important de l’Historial de la Grande Guerre de Péronne dans la constitution d’une historiographie européenne de la guerre, Matthias Steinle étudie en détail la représentation du conflit à travers les documentaires télévisés produits dans les deux pays pendant les années 1960. Pour le reste, les contributions sont essentiellement centrées sur l’Allemagne : Gerhard Hirschfeld évoque les rôles successivement joués par la « Bibliothèque de la Guerre mondiale » de Stuttgart au gré des changements de régimes en Allemagne entre 1915 et 1944, Christian Saehrendt s’intéresse aux monuments aux morts dans les conflits mémoriels à Berlin.
Quelques textes répondent un peu plus précisément à l’ambition d’aborder la culture mémorielle dans ce qu’elle a de plus populaire : Hans Grote étudie de manière très précise le mythe du « Baron rouge » dans le domaine de la bande dessinée, Wolfgang Hochbruck s’attache à des groupes d’historiens amateurs qui se livrent à la reconstitution de batailles de 1914-1918, Susanne Brandt évoque pour sa part les voyages organisés sur les champs de bataille, de la guerre jusqu’à notre époque.
Contrairement à ce que laisse espérer (ou craindre ?) la couverture du livre, qui montre un avion en tôle bricolé à Madagascar en hommage au Baron rouge Manfred von Richthofen, très peu d’études s’attachent en fait au kitsch ou aux aspects les plus triviaux de la culture mémorielle de la Première Guerre mondiale. On a plutôt affaire à des études d’histoire culturelle assez classiques dans leurs objets et leurs méthodes, finalement très proches de celles qu’on a vu se développer en France depuis le début des années 1990.
Les différentes contributions sont loin de constituer un ensemble homogène, mais elles permettent cependant de nombreux recoupements : le texte de Horst Tonn sur la Première Guerre mondiale dans les films américains évoque ainsi All Quiet on the Western Front (1930), le film de Lewis Milestone tiré du livre de E. M. Remarque cependant que Thomas F. Schneider définit dans une autre contribution l’œuvre de Remarque comme un véritable « monument virtuel du soldat inconnu ».
La « culture mémorielle populaire » qui donne son titre à l’ouvrage apparaît par ailleurs comme un concept assez vague. On aurait aimé que les directeurs de la publication distinguent plus précisément ce qui relève de la mémoire et de l’histoire, de la culture savante et de la culture populaire, qu’ils interrogent le passage de l’une à l’autre. Cela aurait probablement permis aux différents contributeurs de s’approprier un peu plus une problématique qui reste implicite dans la plupart de leurs textes.
Cette flexibilité conceptuelle n’est cependant pas rédhibitoire. L’ensemble des contributions réunies dans ce volume constitue un panorama très intéressant, sinon exhaustif, des problématiques contemporaines dans le champ historiographique de la Première Guerre mondiale. Le concept de « culture mémorielle populaire » apparaît encore insuffisamment circonscrit, mais il pourrait certainement s’avérer très frucutueux si on s’avisait de l’appliquer à une comparaison systématique de la Première Guerre mondiale en France et en Allemagne.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire